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 Andrew Dominik par Livres-Addict.fr 

"L'assassinat de Jesse James par le lâche Robert Ford" d'Andrew Dominik

jamesjesseVoici un western inédit tant par ses contours que par son contenu. Poétique, psychologique, métaphysique, il déjoue toutes les lois du genre.

Les grands espaces sont seuls à perpétuer les codes en vigueur mais ils sont empreints d'une rare solennité, une sourde oppression pèse sur eux.

C'est une variation sur le désir mimétique poussé dans ses derniers retranchements. 

Voici Brad Pitt inattendu et magistral en Jesse James majestueux et secrètement blessé. Hiératique et charismatique en diable. Voici Casey Affleck, jeune godelureau aux allures de nigaud mais de nigaud cauteleux qui impose sa présence bancale, sa mèche gominée, ses paupières lourdes, son oeil vitreux, son regard chassieux, son verbe détricoté, sa diction heurtée, sa voix de fausset, ses gestes suspendus et son élégance surannée : la composition du jeune acteur est saisissante autant que prodigieuse.

C'est l'histoire d'une fascination qui tourne au meurtre. On se croit par moments chez Henri James voire chez Benjamin Constant tant la charge romantique est présente, et puis on bascule dans la tragédie grecque ou le drame shakespearien.

jessejamespittMais Brad Pitt possède aussi une envergure et magnétisme christiques tandis que Casey Affleck campe un Judas idéal d'ingénuité matoise. Ici l'esthétique tient lieu d'éthique. C'est son élégance gestuelle et sa décapante acuité verbale qui imposent la suprématie de Jesse James. Il faut voir Brad Pitt à l'oeuvre : sa fausse désinvolture, son économie de mouvements, ses postures, aussi tendus par l'exigence que lourds d'une mortelle menace, son usage suprêmement intelligent de la dérision, tout cela se combine pour bâtir, sous nos yeux et en temps réel, une légende.

Cependant le héros est fatigué, il est même secrètement fracassé et cette fêlure que Brad Pitt donne à voir à travers des regards noyés d'angoisse et une gestuelle brusquement hagarde un corps comme absent, inhabité, voilà qui contribue à créer une aura indiscutablement romantique.

Est-ce en raison de cette défaillance, parce que la statue a été déboulonnée, que le jeune Robert Ford veut la peau de son idole ? Est-ce parce que, à défaut d'égaler son modèle, à défaut d'être lui, il veut l'avoir ?

Les huis-clos irrespirables, saturés de tension se succèdent mais ils sont magnifiés par la beauté des acteurs qui sont, l'un et l'autre, dans chacun de leurs gestes, des tableaux.

BH 10/07

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