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  Sidney Lumet par Livres-Addict.fr 

 "The offence" de Sidney Lumet (1972)

offenceAu début, il y a une traque filmée au ralenti, une course presque immobile, des flics affolés déboulent par tous les bouts dans les couloirs du commissariat mais leur précipitation est vaine, leur action empêchée, ligaturée, l'urgence est comme figée, ils convergent dans un goulot d'étranglement : une grande salle nue et centre un homme hagard (Sean Connery charbonneux, égaré) est entrain d'en rosser un autre à mort.

Tout le propos du film consistera à élucide comment cet inspecteur chevronné surpris en plein déchaînement meurtrir a pu en arriver là.

Ce film n'est pas policier, c'est le portrait saisissant d'un homme brisé par l'exercice de son métier, un homme qui à la longtemps coudoyé la folie avant de se faire happer par elle.

La ville dans laquelle exerce cet inspecteur est en émoi : un pervers sévit qui entraîne des fillettes vers la forêt où il les violente. L'inspecteur est convaincu d'avoir mis la main sur le coupable en la personne d'un bourgeois bien mis, découvert errant et maculé de boue et qui oppose à ses investigations des réponses roublardes et un sourire goguenard.

Le film est composé de plusieurs séquences peu oxygénées, séquences à haute teneur émotionnelle et anxiogène. Il s'agit de huis-clos successifs et suffocants qui mettent l'inspecteur face au suspect mais aussi, après le meurtre, face à sa femme disgracieuse, rudoyée, impuissante à le secourir puis face à un magistrat ou un collègue ravagé d'angoisse, concentré de douleur pure, chargé de tirer l'affaire au clair. La chronologie est habilement éclatée de même qu'éclate la tête de l'inspecteur colonisée par l'horreur; prise de poussées hémorragiques car se succèdent les visions insoutenables : corps découpés, déchiquetés, cadavres désossés ...

Aucun filtre protecteur ne remplit plus son office, la mémoire au lieu de trier charrie tous les bas-fonds, les ordures affluent, l'abjection envahit tout l'espace, l'enfer est à l'intérieur, il n'y a plus de vie mentale possible sous une forme autre que la fureur. Sean Connery, sombre, déglamourisé, ravagé d'angoisse, concentré de douleur pure, compose un personnage inédit. Grande carcasse rompue, colosse terrassé, il campe magistralement un homme hanté qui quête éperdument, jusqu'à l'ultime seconde, une goulée d'air. A la fin, il reste cette image glaçante d'un possédé qui est aussi un fantôme.

BH 09/07
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