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 Dominic Murphy par Livres-Addict.fr 

"White Lightnin'" de Dominic Murphy

image_whiteCe film est fou. C'est un film de folie en même temps qu'un film sur la folie. Selon Michel Foucault, "Par le jeu du miroir comme par le silence, la folie est appelée sans répit à se juger elle-même. Mais en outre, elle est à chaque instant jugée de l'extérieur; jugée non par une conscience morale ou scientifique, mais par une sorte de tribunal invisible qui siège en permanence" et ce film en est l'éclatante démonstration. 

La vie retracée s'inspire d'une réelle existence cabossée, celle de Jesco White (lequel, désormais quinquagénaire, sévit toujours en dépit de son parcours accidenté) mais ce qui en est traduit est une trahison des plus réussies.

L'avatar de Jesco White, donc, né dans les Appalaches parmi les bouseux, est doté d'une famille chaotique, d'une histoire familiale sinistrée, houleuse mais d'un père aimant quoique fantasque et rompu à cet art très pariculier qu'est la danse des claquettes country. Il initiera son fils à cette pratique dans laquelle ce dernier s'illustrera si bien qu'il en deviendra l'une des figures emblématiques. Du moins dans ses trop rares périodes de lucidité car le gamin révéle, dès son âge le plus tendre, d'exceptionnelles dispositions pour la polytoxicomanie : dès l'âge de 6 ans, c'est un sniffeur d'essence émérite et dès cette période-là, l'enjeu consiste, pour le père, à l'arracher, par la pratique acharnée de la danse, aux séductions, aux sirènes des paradis artificiels.

image_whiteEntre deux séjours en maison de redressement ou en psychiatrie puis entre deux prestations électriques et azimuthées, notre homme soumet son corps aux traitements les plus insanes. Son corps, recel à lui seul d'une véritable démonologie. Et ces démons, loin de chercher à les conjurer, il cultive avec un zèle frénétique leurs vertus soufrées et pulvérisantes. Roi de la défonce dont aucune forme ne résiste à ses investigations, il ajoute à sa panoplie du maudit la pratique effrénée de l'automutilation.

Bien qu'il s'adonne à des rituels à teneur clairement satanique, notre zigue n'en revendique pas moins une parenté avec le Christ lui-même et plus le film avance, enchaînant les trips hallucinés, plus la ressemblance entre le modèle et l'aspirant crucifié devient saisissante. Le rockeur trash affiche en effet un corps décharné et un visage hanté de Christ parfaitement iconique.

Tout aussi saisissant est le traitement des images : syncopales, convulsives, entrecoupées d'écrans négatifs, de trous noirs aspirant toute substance vive, elles constituent une succession de vignettes épileptiques qui nous scotchent à même la conscience lépreuse du héros;

Pseudo biographie sans complaisance aucune puisque le mythe romantique du rockeur subversif mais finalement rédempté y est singulièrement mis à mal (ici, on n'assiste à rien d'autre qu'à une déchéance), ce film spasmodique à l'esthétique hautement stylisée exerce une forme de séduction trouble et hypnotique.

BH 03/10

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