Funambule chancelant, Renaud Burel nous balade dans les temps entrechoqués de sa vie chahutée, de ses romances cabossées. Dans les éclats rapatriés de remémorations fiévreuses, on fait la connaissance de Maud, amour fou et fatal, de Mathilde, "amour de miel, de foudre et de mystère », interrompu puis furieusement renoué, de Nadine, bel ange substitutif et compensatoire, de Martine Artaud l’allumée, la frappadingue torturée et tortionnaire. Et d’Inès la tendre, l’amie-amante compassionnelle qui court tout au long du texte, qui est contemporaine de l’écriture, qui recueille notre écrivain et accompagne sa rédemption. Toutes ces figures féminines sont, peu ou prou, élevées au rang de Circé, elles sont magnifiées, auréolées, célébrées. Car les femmes, l’amour, c’est la grande affaire de Renaud Burel. Avec l’écriture qui le tient aux tripes et lui cheville le corps. L’écriture et la difficulté d’être : Renaud Burel est en effet de ceux qui paient très cher la contrepartie de leur porosité, de leur don visionnaire, il est de ceux qui paient en monnaie de folie. Et la quête amoureuse de notre chevalier est entrecoupée, entrelardée de sévères épisodes camés, de détresses psychiques inouïes et de séjours psychiatriques.
Mais l’épopée aux accents parfois rimbaldiens vaut surtout par le style. Car on a là une langue pleine de verve et de verdeur mais on ne peut plus à fleur de peau et qui tressaute et palpite au gré de secousses électriques et lyriques qui sont autant de fulgurances poétiques. Et l’absolue candeur de l’ensemble laisse pantois et crève le cœur.
BH 07/13