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 Eric Ferrari par Livres-Addict.fr

"Abris et déblais" d'Eric Ferrari (Cheyne éditeur)

Eric Ferrari écrit raide et troué. Mais il procède à un décapage si radical que les silences des trouées sont d'une densité égale à celle des mots, pesés et comptés.

La poésie qu'il pratique n'est pas un chant, on croirait plutôt une volée de coups assenés mais des coups qui provoquent l'éblouissement et procurent la jouissance. Les raccourcis, dans cette langue tout ensemble concassée et ciselée, sont si fulgurants qu'ils nécessitent parfois plusieurs lectures pour qu'on prenne pleinement la mesure de l'épaisseur et de la teneur humaine qu'ils recèlent. Et pourtant, dès l'abord, on est saisi, percé. On sait qu'on touche là l'intensité brute mais aussi, et paradoxalement, une forme de beauté suprême et suprêmement raffinée. Le dépouillement est le creuset et la condition de l'apparition. Car c'est bien à une succession d'épiphanies qu'on assiste. Les bribes, les brins, les fragments, les éclats, les chutes sont élevés à un rang sacré, dotés d'un pouvoir initiatique et hypnotique. Le réel le plus trivial est réenchanté et tout étincelle.

On va de saisissement en saisissement sur le fil d'une sensibilité écorchée, au gré d'une sensualité vibrante, puissante, qui tout emporte.

C'est un précis et un précipité de sidérations très haut perchées. Et les astres qui diffusent une lumière si violente ne sont pas morts.

Ainsi : "La tête bêche la tête, l'épaisseur gagne. Le ciel est haut dans le ciel. Et l'air, chiffon dans la bouche. J'essaie l'enfance.
"Des mottes de savon flottent dans la baignoire. Je suis venu, je viens toujours. Nous pouvons rester.
La main qui t'éclaire a mon regard."

"Fatigue qui épouse le vif des sidérations.
La chaise renversée est froide. Pesante. Quiconque.
Qu'il soit et ravaude"

"L'irruption de la plaine et du ciel dans ta poitrine, les limites s'ouvrent de tous côtés. Tu es de plus en plus seul, de plus en plus nombreux. Au-delà de tout prête-nom.
Comme s'il fallait une chute d'appui.
Ainsi face contre face, un œil et un œil font une seule bouche, un seul et même nœud de souffrance et de lumière"

"J'invente à moitié vrai. Sauf la fleur rouge sur le tas de centres et l'attente qui déchire la gorge.
Vigilants et perdus, nous serons valets au ventre aguerri. Expirant toutes les déclinaisons d'une pesanteurs de braise. Parfois l'éclaircie c'est l'averse."

BH 11/13

              

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